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L'inventeur

Publié le par Diluvien

L'inventeur

   Paul en avait marre de son métier de commercial dans les téléphones. Il avait bien tenté quelques expériences pour gagner autrement sa vie, mais cela avait toujours été un échec. Et pourtant il le savait : il avait en lui assez d'idées pour en vivre. Il lui 'suffisait' de trouver comment.

   Le problème est qu'il n'était pas bricoleur pour un sou, et que pour déposer un brevet il faut être capable de construire un prototype. Alors cette fois il avait décidé de procéder inversement. Il avait acheté tout plein d'outils, du matériel, s'était confectionné un atelier dans son sous-sol. Il n'avait plus qu'à construire, à tenter ET ensuite selon le résultat il pourrait déposer un brevet.

  Il cloua, colla, scia, martela... Et ceci pendant plus d'un mois. Sa femme ne comprenait pas "Ton n'idée n'a aucune logique. Comment veux-tu obtenir quelque chose de cohérent de cette façon" Lui dit-elle un jour en regardant la compilation d'objets tous plus absurdes les uns que les autres qui s'entassaient dans l'établi.

   Mais cela ne découragea pas Paul. Il savait qu'il devait faire ainsi. Comme si une voix venue de nulle part le guidait. Et ce samedi après-midi, alors qu'il se remettait à la création d'une nouvelle œuvre, il prépara plusieurs petites pièces de métal qu'il avait découpées et poncées de différentes tailles pour les coller sur une planche. Elles étaient toutes là alignées devant lui et il commença. Il colla la première, puis la seconde.

   Sauf que quand il tenta d'attraper la troisième elle lui échappa des doigts et tomba à côté sur le meuble, il tendit la main sans réfléchir mais dès que ses doigts attrapèrent la forme elle lui échappa pour rouler par terre. Il se leva, fit le tour et se pencha. Mais une nouvelle fois, impossible de se saisir de la forme. Cela dura ainsi pendant une bonne heure.

   Paul arriva dans la cuisine, les yeux pétillants et s'adressa à son épouse avec un ton enjoué : « Ça y est ma chérie ! J'ai enfin trouvé mon invention !". Elle se stoppa dans la préparation de son plat, assise à la table de la cuisine. "Ah oui ? Et c'est quoi ?". Il se frotta les mains, il ne savait comment donner le côté théâtral nécessaire. « Une forme insaisissable !

Pardon ? Une quoi ?

J’ai taillé sans le savoir, comme par miracle (ses arguments de vente se construisaient déjà) une forme étrange mais qui correspond pile à une forme géométrique abscons qui la rend impossible à saisir. Même avec des objets, j’en ai testé plusieurs. Le principe est simple : dès qu’une pression se fait sur cette forme elle en échappe naturellement ! C’est génial non ? Chérie, tu ne comprends pas ? On va devenir riche !

Supposons que cela soit vrai, à quoi cela sert il ?

Je n’en sais rien moi, il y a mille utilisations possibles ! Un système d’antivol, un nouveau principe de roulement à bille, un vêtement protecteur, une décoration, un jeu pour animal ou pour enfant, voir même le sujet d’un nouveau type de sport ! Pleins de choses quoi ! Ils trouveront bien, je n’en doute pas. On va se l’arracher !

Je veux en avoir le cœur net ».

   Elle le suivi donc dans son atelier et il lui montra le petit bout de métal, encore sur le sol au dernier endroit où il avait tenté de le ramasser, encore entouré d’un tas d’ustensiles (pinces pour le BBQ, différents types de gants - cuir, latex, pour le ski, un balai et une pelle, plusieurs boites et un aimant.

  « Tu vas voir », dit Paul. Il se saisit d’un gros aimant et l’approcha de la forme, elle fut attirée mais à peine eut-elle touché l’objet qui l’attirait qu’elle glissât contre lui et retomba. Il attrapât ensuite une boite et la fit glisser le long du sol jusqu’à son invention de sorte à la faire glisser dedans par l’un des bords, mais elle entra et ressortit immédiatement. « Tu vois ? Impossible de s’en saisir par quel que moyen que ce soit !

J’avoue que je suis convaincue du principe. Moins de l’intérêt. Mais on ne sait jamais, dépêche-toi d’aller la faire breveter !

— Je me prépare et j’y cours ! », répondit Paul.

   Et il remonta se doucher et imprimer le formulaire qui accompagnerait le dépôt de sa génial création. Il devait y aller le jour même. En se préparant il imaginait déjà sa vie future.

   Malheureusement cette invention ne verra jamais le jour… Après avoir tout préparé Paul redescendit au sous-sol pour joindre son prototype à son dossier de présentation de son invention. Mais il ne trouva jamais le moyen de la saisir pour l’apporter au bureau des brevets. Lui et son épouse tentèrent pendant des mois, poursuivant comme une souris folle l’objet jusque dans des endroits improbables atteints a fur et à mesure des essais. Du sous-sol jusque dans la rue, puis dans un supermarché, dans le métro et ainsi de suite. Obligés de l’abandonnée chaque soir pour aller se reposer et poursuivre leur quête le lendemain. Mais sereins : au moins il n’y avait aucune chance que l’objet ne soit saisit par un autre dans la nuit…

 

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